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Site de l’Association Amicale Santé Navale et d’Outre Mer (ASNOM)

NOUVELLE CALEDONIE : TENSIONS MAJEURES SUR LES PERSONNELS HOSPITALIERS
Article mis en ligne le 3 septembre 2025

En Nouvelle-Calédonie, l’effet des émeutes qui ont secoué l’archipel en mai 2024, il y a 15 mois, continue de peser lourdement au niveau des ressources humaines du CH territorial Gaston Bourret situé sur le médipôle de Koutio à Dumbéa en périphérie de Nouméa. Selon la direction de l’établissement, les répercussions de ces évènements se révèlent être beaucoup plus importantes que ce qui avait pu être imaginé et anticipé : « l’onde de choc est terrible ».

Le médipôle de Nouméa inauguré en 2016.



Ce sont les effectifs paramédicaux, infirmiers et infirmiers spécialisés en particulier, qui ont été durement touchés, aboutissant au départ d’environ 20% des effectifs lors de la crise. Dans ce domaine, plusieurs vagues de départs sont survenues, concernant dans un premier temps des contractuels de moins d’un an qui venaient d’arriver et qui, choqués, sont vite repartis. Petit à petit, ceux qui étaient présents depuis moins de deux ans et sans perspective sur le territoire sont à leur tour repartis. Enfin, cela a pu toucher des personnels durablement installés, inquiets pour les études de leurs adolescents. Cette pénurie a conduit à la fermeture à l’hiver 2024/2025 de 20 % des lits d’hospitalisation conventionnelle et à une limitation importante de l’utilisation des salles opératoires, incluant l’activité obstétricale.
Si les défections ont touché avant tout les infirmiers, l’hôpital de Nouméa a également perdu la quasi-totalité de ses kinésithérapeutes (16/17) avec un impact important au niveau de l’activité de réanimation. Ceci implique de travailler avec des libéraux qui ont perdu énormément de leur activité pendant la crise et étaient donc demandeurs mais qui ont souvent une méconnaissance de la pratique hospitalière et qu’il convient donc de raccompagner dans ce type de soins obligeant à une réorganisation totale de ce secteur.
Même si le climat n’est pas encore très serein, certains soignants se décident actuellement à faire le chemin en sens inverse et à revenir en Nouvelle-Calédonie.
Malgré cette période de calme apparent et ces quelques retours positifs, une fatigue psychologique s’est installée chez les personnels paramédicaux et avec elle une exaspération de voir partir des collaborateurs de longue date. Selon la direction de l’hôpital, s’il y a eu beaucoup de mutualisations, de soutien et d’entraide pendant cette période, de nombreuses difficultés persistent et l’on note actuellement très peu de recrutements, avec encore beaucoup de désistements au dernier moment malgré des promesses d’embauche.
Cette situation est encore aggravée du fait de la destruction des locaux de la formation infirmière de Nouméa et de l’interruption des études pendant plusieurs mois ce qui implique la poursuite de la formation de ces élèves en métropole. Aucune rentrée n’est prévue en 2026 et il n’est pas certain que tous ces étudiants reviennent à l’issue de leur formation, une dizaine d’entre eux seulement envisageant de rejoindre l’hôpital.
Enfin, largement attractives avant le Ségur, les grilles salariales des personnels ne le sont plus du tout. Aucune transposition n’est à l’ordre du jour vue la situation économique et financière du territoire, à tout le moins sur financement néo-calédonien.

Du côté médical, c’est plus d’une trentaine de médecins qui ont quitté l’établissement impactant surtout certaines spécialités déjà en tension avant les émeutes : l’oncologie, l’hépato-gastroentérologie, l’ophtalmologie, la chirurgie vasculaire et thoracique ; pour ces trois dernières spécialités, il n’existe plus personne sur la ligne d’astreinte depuis plusieurs semaines.

À cela se surajoute la situation elle aussi délicate des 30 internes, rendant la tenue des gardes épineuse. Faute d’internat, les locaux ayant été incendiés et saccagés, ils bénéficient d’une indemnité compensatrice de logement. Plusieurs ont demandé une interruption anticipée de leur stage et seuls une vingtaine ont prévus de se déplacer lors du stage à venir d’où un déficit préoccupant.

Cette pénurie médicale et paramédicale a évidemment demandé de la part des responsables de l’établissement un travail d’adaptation quotidien, nécessitant des ajustements capacitaires successifs et intempestifs pour préserver autant que faire se peut le plateau technique et l’offre de soins en particulier au niveau de la réanimation et des urgences. Il a également fallu faire preuve d’initiatives en tous genres, depuis la montée en compétences des aides-soignants, des fonctionnaires locaux pour leur part pleinement restés sur place, le recrutement de praticiens à diplôme hors Union européenne en sus des stagiaires associés, ou encore la signature de partenariats avec des établissements privés non lucratifs franciliens afin de garantir une permanence médicale sur les spécialités en tension.

Accès à l’hôpital de Nouméa.